Allez, pour remonter le moral de véronique

, voici la chronique d'une fin annoncée...
Selon l'ASP (Association for the study of paek ol and gas) les prévisions de production sont surévaluées pour des raisons boursières et politiques. Elle prédit que le pic pétrolier mondial se produira vers 2006 (c'est fait) et le pic gazier vers 2007 (on y est).
Le monde que nous connaissons est appelé à connaître dans un futur proche des changements radicaux. Notre civilisation (qui s'est développée en exploitant une source d'énergie facile à exploiter et à transformer) est sur le point d'affronter la plus grave crise qu'elle n'est jamais connue.
Cette crise c'est la fin de l'âge du pétrole. Une date ? Pour les plus pessimistes 2012/2017 et pour les plus optimistes 2020/2030.
La prévision classique "il reste assez de pétrole pour tant d'années" est faite en supposant que la consommation reste constante. Malheureusement, c'est loin d'être le cas. Ces dernières années, de nouveaux très gros consommateurs (la Chine et l'Inde principalement) sont apparus sur le marché.
Entre le début de l'exploitation du pétrole et sa fin, la production passe nécessairement par un maximum. C'est "le pic de Hubbert" du nom du géologue qui l'a calculé en premier. En 1956, il a prédit que la production de pétrole aux USA atteindrait son maximum aux alentours de 1970 avant de commencer à décroître. Evidemment tout le monde l'a ridiculisé. Et pourtant, il avait raison !!
Au fait, savez-vous qu'elle est la véritable puissance qui règne sur le monde ? Allez, je vous laisse chercher ! Un indice ? Bon d'accord ! C'est une multinationale qui a pour emblème une coquille Saint-Jacques...
Un bref (très bref) historique de cette multinationale. En un siècle la petite compagnie anglaise de transport pétrolier a fusionné avec l'exploitant Royal Dutch et est devenue l'un des principaux acteur du secteur. Répondant à une logique purement privée, ses dirigeants n'ont pas hésité à s'allier au IIIème Reich, à Abasha au Nigéria, ou au SLORC birman; les dictateurs étant toujours moins regardants sur les questions sociales et environnementales.
Aujourd'hui, la compagnie jure qu'elle respecte de hautes normes éthiques, mais ses promesses seront d'autant plus difficile à tenir que les tensions s'accroissent sur le marché pétrolier (et qui la contrôle ?).
Shell (ah, zut ! j'ai donné la réponse !), est aujourd'hui une multinationale comptant plus de 2000 filiales et sociétés rattachées, présente dans 143 pays et employant plus de 90 000 personnes. Elle reçoit 25 millions de clients par jour et réalise un chiffre d'affaires annuel de 179 milliards de dollars, ce qui, comparé au PIB des Etats la placerait en 24ème position mondiale.
Depuis le premier choc pétrolier de 1973/1974 (qui mis fin aux Trente glorieuses françaises), toutes les interventions militaires américianes peuvent être analysées à la lumière de la crainte du manque de pétrole bon marché. Ce fut d'ailleurs le pic de la production pétrolière américiane en 1970 qui permit à l'OPEP de prendre la main et de susciter ce premier choc, en même temps que la guerre du Kippour. Les Etats occidentaux tentèrent alors de reprendre le contrôle et de conjurer le spectre de la pénurie, moins par la sobriété énergétique que par l'activation des champs pétroliers de l'Alaska et de la mer du Nord.
En 1979, la révolution irannienne et le second choc pétrolier permirent à l'OPEP de reconquérir la préeminence tandis que les économies occidentales payèrent cher leur voracité, en pétrole, par la récession des années suivantes.
Au début des années 1980, la reconquête américaine sur les cours et les flux de pétrole passa par le financement et l'armement de Saddam Hussein pour gerroyer en Iran, et par la complicité acquise du roi Fahd en Arabie saoudite pour augmenter les exporations de brut vers l'Occident. Cela permis le contre-choc pétrolier de 1986, regain de la croyance occidentale en l'abondance pétrolière illimitée, continuation de l'avidité énergétique jusqu'aux guerres d'Irak (1991/2003) quels qu'en soient les morts (100 000 ? 300 000 ?), quels qu'en soient les coûts (100 milliards de dollars ? 300 miliards ?), quels qu'en soient les moyens (budget annuel du départment de la défense: 400 milliards de dollars).
Pendant les mêmes quinze dernières années, les multiples conflits des Balkans trouvent leur source et leur résolution dans la volonté américaine d'écarter la Russie des routes de transport du pétrole de la mer Noire et de la Caspienne vers les ports de l'Adriatique via la Bulgarie, la Macédoine et l'Albanie.
La géopolitique du pétrole autorise tous les pactes avec les islamistes, de l'Asie centrale jusqu'en Bosnie, toutes les connivences cyniques avec les terroristes, jusqu'au voyage de Tony Blair en Libye (mars 2004) pour permettre à Shell (tiens !) de remonter le volume de ses réserves aux prix de quelques centaines de millions de dollars. L'actuel projet américain de Grand Moyen-Orient, habillé de considérations humanitaires et démocratiques, n'est rien d'autre que la tentative de poser définitivement la main sur tous les robinets pétroliers de la région.
Plus de trente ans de souci pétrolier n'ont pas déssillé les yeux des dirigeants américains et européens sur la crise énergétique qui se profile à court terme. Malgré ce que disaient René Dumont et les écologistes dès la campagne présidentielle de 1974 (déjà !!) les gouvernements des pays industrialisés ont continué et continuent à croire au pétrole bon marché quasi inépuisable (au détriment du climat et de la santé humaine, détraqués par les émissions de gaz à effet de serre) plutôt que d'organiser la décarbonisation de leurs économies.
Cependant, le choc pétrolier qui s'annonce avant la fin de la décennie ne ressemble pas aux précédents. Cette fois-ci, la partie n'est plus, seulement, géopolitique, elle est géologique. En 1973 et 1979, la pénurie était d'origine politique, décidée par l'OPEP. Puis il y eut restauration de l'offre. Aujourd'hui, ce sont les puits eux-mêmes qui déclinent. Même si les Etats-Unis parvennaient à imposer leur hégémonie sur tous les champs pétroliers du monde (hors Russie) leur armée et leur technologie ne pourront rien contre la déplétion prochaine du pétrole conventionnel.
Il nous reste de toute façon trop peu de temps pour remplacer un fluide aussi bon marché à produire, aussi énergétique, aussi facile d'emploi, de stockage et de transport, aux utilisations aussi multiples et réinvestir en moins de dix ans 100 000 milliards de dollars dans une autre source d'abondance qui n'existe pas.